Cher Monsieur Loland,
Je sais bien qu’on ne doit pas tirer sur une ambulance. Mais comme il ne faut pas non plus accrocher un bouquet de demoiselle d’honneur, une pancarte « just married » et des casseroles à un corbillard, je me permets de vous écrire ces quelques lignes. Vous voudrez bien excuser mes maladresses de style et mes fautes, mais je n’ai pas fait l’ENA. J’ai appris à lire, à écrire et à compter avec des instituteurs, sous payés, dévoués, républicains et laïcs, des fois sévères mais toujours justes. J’ai appris à raisonner avec des enseignants tout aussi mal payés mais compétents et consciencieux. D’ailleurs, il leur arrivait même de me mettre des bonnes notes ! J’ai appris à concevoir avec des professeurs guère mieux considérés mais également respectables, en payant mes études grâce à un poste de surveillant. Aujourd’hui, les fils de prolo ne peuvent plus financer leurs études en étant pions… On se plaint du bordel qui règne dans les lycées, mais il n’y a presque plus de pions. Et en pourcentage, il n’y a pas plus de fils d’ouvriers ou de paysans dans les facultés françaises de nos jours qu’en 1968. Mais ça n’est pas de ça dont je souhaitais vous parler. En effet, le but de ce courrier, c’est de vous expliquer pourquoi vous êtes dans la mouise. Voilà : vous êtes combattu par le patronat, la droite et le centre parce que vous êtes de gauche. Et vous êtes combattu par la gauche parce que vous n’êtes pas de gauche. Résultat, vous n’êtes nulle part… Si j’osais, j‘écrirais : le cul entre deux chaises. Oh, je ne mets pas en doute vos compétences. Vous êtes plus brillant qu’on ne le dit. Et beaucoup plus malin qu’il n’y paraît. Tiens, je ne parierais pas, par exemple, que le nom de Nafissatou Diallo vous soit inconnu… Vous êtes plus retors, plus calculateur, plus habile qu’on ne le croit. Mais vous trouvez que l’eau chaude est trop chaude, que l’eau froide est trop froide et que l’eau tiède est trop tiède. Du coup, vous vous abstenez de toucher aux robinets. Qu’une bande de zozos mette un bonnet rouge, qu’un groupe de zinzins mette un bonnet d’âne, que votre copine mette des bonnets B ou que votre ancienne compagne mette Boney M (He´s a Casanova. He´s a busy lover. Everybody´s trying to tell me. That I´m wasting time away. Too cool for one woman) et hop, aussi sec, vous enclenchez la marche arrière. Pourtant, en combat singulier, vous avez, à mon grand regret, mis KO la Martine de Lille. Parti de pas grand chose, vous êtes parvenu à conquérir l’Elysée. Et ça, je vous en félicite… Avoir sorti de ce palais de la République, un guignol sans scrupules ni principes, sans talent ni culture, ça méritait un big up ! Mais enfin, quand on devient un président socialiste – et ça n’arrive pas tous les jours – on se choisit un modèle. On peut s’inspirer de Jaurès. Je sais, c’est peut-être un peu beaucoup… De Blum, alors. Ou faire comme Rocard et passer sa carrière à se faire regretter pour ressembler à Mendes-France. Beaucoup plus ambitieux, on peut devenir soi même, comme Mitterrand, une référence. Mais vous, on dirait que votre exemple est Guy Mollet. Celui qui est resté dans l’histoire comme un simple mauvais souvenir n’a-t-il pas dit : « On nous dit que notre politique a échoué. Est-ce une raison pour y renoncer? ». Avouez que cette phrase, vous pourriez la signer des deux mains, dès aujourd’hui ! Mais je vous soupçonne d’avoir une autre idole. Gerhard Schröder. Cet homme qui est aujourd’hui membre du directoire du groupe pétrolier russo-britannique TNK-BP, (fonction pour laquelle il touche une paye de 200 000 euros par an) a mérité l’admiration de toutes les droites d’Europe, en précarisant l’emploi dans son pays, en instaurant des règlements dont même Madame Thatcher n’aurait oser rêver mais surtout en devenant le fossoyeur de la social-démocratie allemande. Si votre véritable but est de devenir DRH chez Gattaz ou sherpa pour Merkel, vous eussiez (ça, je ne l’ai pas appris à l’école, je l’ai lu dans Astérix) mieux fait de rester à Tulle. C’est pas mal Tulle. Pas trop loin du Périgord et du Lot, vieilles terres de gauche. Maurice Faure est né en Dordogne et mort à Cahors. Le siège de Conseiller Général qu’il occupa durant 20 ans est peut-être gagnable ? Conseiller Général de Montcuq, ce serait une saine ambition !
Cf
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